Intégration

Naturalisation et identité hélvétique

Bashkim Iseni pose trois remarques dans le cadre du débat sur la naturalisation facilitée des étrangers de 3e génération.

De nombreux arguments ont été évoqués dans le cadre du débat du prochain vote sur la naturalisation facilitée des étrangers de 3e génération. Néanmoins, il n’est pas inutile de rappeler trois dimensions en lien avec ce rendez-vous politique prochain.

L’obtention de la nationalité suisse pour les immigrés, a, premièrement, clairement un impact sur leur participation politique. En fait, une étude commune de chercheurs issus des Universités prestigieuses de Standford, de London School of Economics et de l’Université de Zürich, a démontré que la naturalisation des immigrés en Suisse touche, à plus long terme, le cœur de la question de leur intégration politique.

Plus concrètement, pour les immigrés qui auraient connu des référendums là où ils sont établis, la naturalisation influence positivement leur participation politique formelle ici se rapprochant de celle des Suisses. Elle améliore également leurs connaissances et leur efficacité politique. Celles et ceux dont la naturalisation a été refusée sont restés marginalisées politiquement. S’il est donc absurde d’utiliser le terme d’intégration pour les troisièmes générations, car elles sont nées et scolarisées en Suisse, la naturalisation facilitée a certainement un impact certain sur le plan de leur participation citoyenne.

Les raisonnements qui émaillent le débat tournent désormais trop souvent autour du passeport rouge à croix blanche

Ce constat nous amène à relever une deuxième dimension de cette problématique, soit le sentiment d’appartenance qui y est étroitement associé. En fait, les raisonnements qui émaillent le débat actuel tournent désormais trop souvent autour du passeport rouge à croix blanche, comme si la citoyenneté se résumait au simple fait d’obtenir ce sésame.

Or en réalité, pour les troisièmes générations, devenir plus facilement Suisses de jure, alors qu’ils le sont déjà, renforce indéniablement le sentiment d’appartenance dans le pays où ils ont nés et où leurs parents, voire leurs grands-parents ont longtemps vécu. L’obtention de la nationalité suisse est certes de fait un acte juridico-politique important, mais elle cristallise aussi un sentiment d’appartenance à une collectivité.

Enfin, le lien national est certes un acte politique, mais aussi culturel et symbolique. Contrairement à la plupart des nations européennes qui véhiculent des mythes fondateurs érigés sur une culture dite homogène, voire d’ancêtres communs, le lien social helvétique repose davantage sur la volonté commune, sur les institutions qui soudent sa diversité, soit le fédéralisme et l’ancrage citoyen local. Le caractère relativement fermé de l’acte de naturalisation reflète certes cette sensibilité spécifique et réfractaire d’appartenance. Toutefois, sachant que les troisièmes générations sont le reflet de ce qui fait cette quintessence suisse, ne serait-il pas contre-productif, de leur adresser un message contraire?

Article paru dans le quotidien 24heures le 3 février 2017