Un nouveau programme radio pour informer les Albanais de plus de 55 ans

Luljeta Krasniqi Hajzeraj fait partie de l’équipe depuis le début des émissions de radio et de la création du Programme « Âge et Migration » de l’organisation EPER (HEKS) en 2012. Elle est collaboratrice du programme et en charge de la communauté albanophone dans les cantons de Genève et de Vaud.

Dans un interview pour albinfo.ch, elle dévoile l’offre du programme pour lequel elle travaille et encourage les personnes de 55 ans et plus à participer à ce programme qui les informe sur des sujets importants en matière de sécurité sociale et santé.

Albinfo.ch: Tout d’abord, pouvez-vous nous présenter le programme « Âge et Migration » de l’organisation « EPER »?

Luljeta Hajzeraj: Le programme « Âge et Migration » a été mis sur pied en 2012 dans le canton de Vaud. L’idée de ce programme est née sur le constat qu’il y avait un énorme besoin en informations pour le public senior migrant. En 2012, une analyse des besoins de la population de l’ex- Yougoslavie a été faite et le constat principal met en lumière un besoin important d’informer les migrants de plus de 55 ans sur le système social et sanitaire. Nous avons également relevé qu’il y avait un besoin d’organiser diverses activités culturelles et récréatives afin de sortir cette population de l’isolement.

De plus, nous offrons des permanences d’écoute et d’orientation permettant aux personnes de parler de leur situation personnelle, via notre permanence téléphonique ou sur rendez-vous.

Albinfo.ch: Quel est votre rôle dans ce programme et depuis quand êtes-vous engagée?

Luljeta Hajzeraj: Je fais partie de l’équipe depuis le lancement du programme en 2012. Je suis collaboratrice du programme et chargée de la communauté albanophone dans les cantons de Genève et de Vaud.

Valdet Ballabani

Albinfo.ch: D’où est venue l’idée de réaliser des émissions de radio en albanais?

Luljeta Hajzeraj: Sachant qu’il existe un grand besoin d’information de cette population et compte tenu des circonstances créés par la pandémie et plus particulièrement par la première phase de semi- confinement, le besoin d’informations a été accentué. L’incapacité d’organiser des séances d’information en présentiel et en groupe nous a poussé à trouver une autre façon pour les informer. Informer les migrants âgés via Zoom, Skype n’était pas un moyen adéquat et accessible par cette catégorie de la population. La radio est donc venue comme une alternative pour les informer ainsi qu’atteindre un grand nombre de la population et ce en un seul clic.

À la base, l’idée était de faire des émissions en direct et de faire en sorte que les intervenants puissent répondre en direct aux questions de nos bénéficiaires. Mais nous nous sommes rapidement rendu compte que techniquement parlant et dans le laps de temps que nous avions à disposition, c’était extrêmement compliqué. Nous avons donc opté pour du « faux direct ». Nous avons récolté

les questions de nos bénéficiaires au préalable et nous avons ensuite enregistré l’émission dans des conditions du direct. Ainsi, les personnes reçoivent le lien au moment de la diffusion de l’émission.

Albinfo.ch: Que comptez-vous accomplir avec ces émissions de radio et combien de temps durera le projet?

Luljeta Hajzeraj: Nous avons obtenu un soutien financier pour une phase de quatre mois pour tester si la radio était le bon moyen d’information.

L’objectif est d’atteindre le plus grand nombre possible de personnes de notre public et de les informer sur les sujets qui les préoccupent durant cette période, tels que: les droits au travail pendant la pandémie; la Convention sur la sécurité sociale entre le Kosovo et la Suisse ainsi que la possibilité de quitter définitivement la Suisse avec un droit à la retraite; l’effet de la migration sur le bien-être psychosocial (avec un témoignage d’un migrant des années 90); l’effet de la pandémie du COVID-19 sur notre santé mentale.

Albinfo.ch: Quand est-ce que vos émissions de radio peuvent-elles être écoutées?

Luljeta Hajzeraj: Nous diffuserons au total quatre émissions en albanais, quatre samedis d’affilée à 19h (13 mars, 20 mars, 27 mars et 3 avril), ainsi qu’une émission en français le 10 avril.

La première émission sur les droits des travailleurs a été diffusée le 13 mars à 19h00 et peut être réécoutée sur notre site: https://www.eper.ch/emission-info-55

Les émissions suivantes peuvent être écoutées tous les samedis, à partir de 19h00 et en un seul clic sur le lien que nous envoyons à l’avance, la veille.

Albinfo.ch: Où est ce que Luljeta se sent-elle le mieux, à la radio ou au téléphone pour donner des conseils aux Albanais en Suisse?

Luljeta Hajzeraj: Je me sens bien là où je peux être utile pour fournir des informations et venir en aide aux personnes qui s’orientent vers moi.

La radio est un moyen d’informer les bénéficiaires sur une thématique concrète, en tenant en compte des questions récoltées. Cet outil nous permet d’informer un groupe plus large. Néanmoins, donner des conseils par téléphone reste le bon moyen pour traiter les questions personnelles.

Je reste joignable pour tout Albanais de 55 ans et plus au numéro: 077 498 35 70 ou à l’adresse email: [email protected].

Albinfo.ch: Qu’y a-t-il de beau et de difficile d’être animateur radio?

Luljeta Hajzeraj: Tout d’abord, les membres de notre équipe ne sont pas des animateurs radio, la radio est devenue, malgré nous, un moyen alternatif pendant le COVID-19, et pour cela nous avons suivi une petite formation d’une journée, et nous essayons de faire de notre mieux pour transmettre les informations. Notre programme n’a pas l’intention de se transformer en radio, mais cette dernière reste actuellement un moyen d’information adéquat.

Ce qu’il y a de beau est la transmission d’informations, tandis que la difficulté est la distance physique.

Qui est Luljeta Hajzeraj?

 Je suis Luljeta Krasniqi Hajzeraj, de Prishtina, juriste de profession. J’ai travaillé pendant douze ans à Prishtina en tant que responsable du secteur juridique d’une entreprise publique ainsi qu’en tant que représentante de cette entreprise devant les tribunaux respectifs. Je travaille en Suisse depuis le lancement du programme «Âge et Migration », soit depuis 2012, en tant que collaboratrice du programme dans les cantons de Vaud et de Genève. Mon objectif a toujours été et reste d’informer ainsi que d’aider au maximum notre public pour les différentes prestations sociales et sanitaires.

 Luljeta Krasniqi Hajzeraj, collaboratrice du programme Âge et Migration, EPER. tél: 077 498 35 70

 Adresse email: [email protected]

 Pour toute question supplémentaire sur le programme Age et Migration : https://www.eper.ch/ project-explorer/age-et-migration-1

 Photo: Julie Lovrens et Julien Laufer

Prochaine émission: Convention sur la sécurité sociale entre la Suisse et le Kosovo: quel impact sur les retraités? Elle sera diffusée ce samedi 20 mars à partir de 19h. Nous vous enverrons demain le lien à écouter sur votre téléphone.

http://ageetmigration.ice.infomaniak.ch/ageetmigration-64…

Portez-vous bien!

S.O.S pour la communauté catholique albanaise du Kosovo

Cela fait plus d’un an qu’elle a été créée mais elle est encore peu connue du grand public. L’Association « Urat -Die Brücken » ne se soucie pas beaucoup de sa popularité. Elle préfère travailler silencieusement à la réalisation de ses objectifs. Et ses objectifs, comme le dit son président Mirash Hajdaraj, sont l’intégration et l’unification des citoyens du Kosovo à l’étranger. L’association est aussi active dans le soutien et la promotion économique de projets au Kosovo organisés par la diaspora, ou encore le lancement de projets conjoints avec d’autres organisations dans le pays et à l’étranger. « Nous soutenons aussi l’échange d’expériences entre les membres de la diaspora émigrés dans différents pays occidentaux comme la Suisse, l’Autriche et l’Allemagne, où vivent beaucoup de nos compatriotes. Notre engagement a aussi pour but de développer le Kosovo avec l’aide de la diaspora, afin de réduire l’émigration du Kosovo », déclare M. Hajdaraj pour albinfo.ch.

Mirash Hajdari
Mirash Hajdari

Alerte sur le risque de disparition de la diversité religieuse et culturelle

« Bien que dans nos statuts nous soulignions que l’association est apolitique et neutre en termes de religion, dans la phase initiale de notre activité, nous sommes déterminés à agir davantage dans les zones où vivent la majorité des Albanais de confession catholique. Dans le phénomène de migration qui est caractéristique de l’ensemble du Kosovo, la communauté catholique connaît une fuite plus intense qui a de graves conséquences. A titre d’illustration, sur les 120 000 Kosovars de confession catholique, seuls 40 000 vivent encore au Kosovo. La tendance migratoire, pour des raisons essentiellement économiques, se poursuit. Rien qu’en Suisse on trouve environ 25 000 Albanais catholiques du Kosovo. Ces chiffres dévoilent avec netteté le problème et la nécessité aiguë d’endiguer ce flux migratoire », explique le président de l’association « Urat-Die Brücken ».

Ces départs, s’ils se poursuivent, aboutiront à la disparition de la communauté catholique du Kosovo, une communauté pourtant clairement identifiée comme étant établie de longue date au Kosovo, et qui représente un élément de connexion entre les cultures albanaise et occidentale. Pour cette raison, notre association veut sensibiliser les gens de bonne volonté, nos hommes d’affaires à l’étranger, mais aussi les sympathisants étrangers, les entreprises, les institutions et les fondations sur les possibilités d’investissement au Kosovo », a ajouté M. Hajdaraj.

La coexistence religieuse entre Albanais n’est pas une exagération, mais une réalité de la vie quotidienne.

Hajdaraj souligne également que les engagements de son association envers la communauté catholique ne peuvent en aucune façon mettre en cause la proximité et l’harmonie exemplaire régnant entre les Albanais de diverses religions. Ce dernier donne l’exemple de son cercle social et amical, la majorité duquel se compose de musulmans albanais. « Je n’exagère pas en disant cela, cette tolérance et cette fraternité sont incarnées dans notre vie quotidienne ».

L’association est enregistrée en Suisse et a comme but principal de donner de l’espoir aux Kosovars pour de nouveaux emplois et une nouvelle expérience occidentale au Kosovo. Elle désire coordonner les Albanais du Kosovo vivant en Suisse, Allemagne et Autriche, leurs familles au Kosovo et les amis acquis dans les pays d’émigration, notamment au travers des ambassades de ces trois pays, qui opèrent toutes à Pristina. La transmission des expériences de ces trois pays au Kosovo et le soutien de ce projet par des personnalités de l’UE nous donnent beaucoup d’espoir et de confiance dans notre capacité à atteindre nos objectifs.

« Nous comptons parmi nos membres et conseillers quelques personnalités connues de la politique internationale, comme l’ancien vice Premier ministre autrichien et ami du Kosovo, M. Erhard Busek, et d’autres personnalités tenant des fonctions dans diverses institutions des pays occidentaux, des ambassadeurs, etc. Grâce à eux, nous espérons renforcer notre initiative en sensibilisant les cercles politiques des pays occidentaux par rapport à nos préoccupations » a déclaré M. Hajdaraj pour albinfo.ch.

« Concernant notre Forum, notre grand écrivain Ismail Kadare s’est également exprimé. Il soutient que notre initiative était très utile et a promis de nous appuyer », a ajouté M. Hajdaraj.

kadare
Kadaré pour « Urat -Die Brücken » et la coexistence religieuse des Albanais

L’harmonie religieuse a été et demeure l’une des particularités de base de notre nation. Il ne s’agit pas d’un paradigme romantique inventé par les poètes, ni d’un regard idyllique de l’histoire. Depuis cinq siècles les Albanais, peuple au tempérament balkanique et au sang chaud, ont montré une tolérance religieuse surprenante. L’histoire albanaise, chargée de nombreux conflits, n’a néanmoins connu durant les cinq derniers siècles aucun conflit ou guerre à motif religieux.

Je ne peux dire que du bien de votre association. L’idée de votre coopération avec les trois pays européens que sont la Suisse, l’Allemagne et l’Autriche est bonne, noble et utile.

La redécouverte de l’Europe n’est pas seulement une manière sûre de contribuer au développement global, mais c’est aussi la seule qui puisse assurer une existence normale à notre nation albanaise. Naturellement, les longues sécessions créent des incompréhensions réciproques. Je me réfère aux incompréhensions que nous avons eues envers l’Europe, et réciproquement les incompréhensions que l’Europe a eues à notre égard. À cet égard, votre forum, portant le nom symbolique de « Urat », aidera certainement à surmonter les malentendus.

 

Aider les jeunes à choisir une profession

Le système d’éducation en Suisse n’est pas simple. Tout le monde ne peut pas effectuer des études et les universités sont très sélectives. Les jeunes albanais sont souvent face à un dilemme gigantesque concernant leur future profession. La question qui se pose le plus souvent est de décider s’il faut apprendre un métier qui apporte plus rapidement un emploi, ou redoubler les efforts et atteindre un niveau élevé d’éducation afin d’entrer dans le cercle des universitaires, médecins, architectes ou professeurs. Les parents souvent ne connaissent pas le système d’éducation et ont du mal à conseiller leurs enfants concernant cette décision.

ster12

Haxhere Alimi, née dans le village de Glogjë au Tetovo, est venue en Suisse à l’âge de seize ans avec un grand désir d’étudier en Suisse. Mais le chemin n’a pas été facile, et aujourd’hui cette femme courageuse témoigne du parcours qui lui a permis d’entrer dans le cercle des enseignants détenteurs d’un diplôme délivré par une Université suisse.

J’ai terminé l’école élémentaire au Tetovo, raconte Mme. Alimi. Je suis venue en Suisse avec ma mère et mon frère en 1998, dans le canton de Schwyz. J’y ai immédiatement commencé les cours dans une classe d’intégration, où j’apprenais intensément l’allemand. Après 3 mois je parvenais à suivre certains cours dans des classes ordinaires avec les autochtones. Après l’école primaire, j’ai entamé une formation d’un an autrement de type « Überbrückungsjahr », ou éducation pré-professionnel.

« Mon plus grand problème était que je n’étais pas bien renseignée sur le fonctionnement du système scolaire en Suisse. Je ne savais pas s’il fallait commencer un apprentissage ou une école. Puis j’ai commencé un apprentissage pour devenir aide-soignante, avec l’objectif de continuer plus tard une école de médecine. Mais lors des cours et de la pratique, j’ai vite compris que ce n’était pas la bonne profession pour moi, même si je voulais travailler à aider les gens »…

ster2

Une chose très intéressante qui éveille la curiosité est le fait que Mme Alimi a également terminé des études par correspondance dans le domaine de l’économie à Tetovo.

Notre interlocutrice poursuit : « Après avoir fini les études d’aide-soignante, je me trouvais à nouveau face à de nombreux questionnements. Quelle formation suivre ensuite, dans quelle école s’inscrire, comment atteindre mes objectifs ?

En fait, les chances réelles de réussir à faire ce que je voulais étaient nulles, parce qu’avec la formation que j’avais faite, les études universitaires m’étaient fermées. Je ne pouvais pas m’inscrire à la faculté de mon choix. La condition à mon admission aux études était le diplôme d’études secondaires. Finalement j’ai obtenu le diplôme d’études secondaires à Tetovo, et ensuite j’ai planifié la poursuite de mes études à l’Université de Tetovo à la Faculté de langue et littérature allemande. L’idée était que cette formation allait m’aider à perfectionner la connaissance de la langue et de la littérature allemande. J’ai terminé avec succès mes études à Tetovo et je suis revenue en Suisse.

Après les études, je savais dans quel domaine je voulais travailler dans le futur. Je voulais mieux comprendre la situation des étrangers dans le pays, ainsi que les aider, indépendamment de leur religion, leur origine, la couleur de leur peau ou leur langue. Au départ, j’ai effectué des traductions en albanais-allemand dans le centre d’intégration « Kom-in » dans le canton de Schwyz. Plus tard, j’ai suivi un cours sur deux niveaux, à la Croix-Rouge, en tant que traductrice interculturelle. J’étais heureuse dans mon travail, mais mes objectifs ne s’arrêtaient pas là. Mon objectif d’étudier en Suisse demeurait. Et je me suis lancée, j’ai envoyé ma candidature à la haute école de pédagogie du canton de Schwyz. J’ai fait trois années d’études comme enseignante parascolaire. Accomplir cette formation m’a demandé de relever un grand défi, mais cela aura été expérience enrichissante et une occasion de comparer le système éducatif suisse et celui de ma ville natale.

A la question des différences et des points communs entre les deux systèmes, elle répond : « A Tetovo les études étaient plus dans la spontanéité, et les étudiants avaient beaucoup de temps libre car les demandes des professeurs étaient moindres. Les études étaient plus théoriques et nous n’avions pas beaucoup de cours pratiques. Durant mes quatre ans d’études, j’ai eu seulement un mois de pratique et ce, sans aucun dirigeant et sans aucune évaluation après la pratique. En Suisse, au cours de chaque semestre, nous avions des cours pratiques et c’est à mon sens la plus grande différence entre ces deux systèmes universitaires » a-t-elle dit.

ster1212

Aujourd’hui, Mme Alimi a créé un centre d’éducation pour les parents et les enfants « Eltern-Kind Musikus Zentrum » dans la commune de Volketswil à Zurich, pour les enfants de 2 à 12 ans, en collaboration avec Mme Luljeta Shaqiri, psychologue, avec qui elle avait un bon contact depuis l’époque des études, grâce à l’association « Studenti ». Dans ce centre, en plus du programme éducatif et musical pour les enfants en langue albanaise et allemande, différents cours pour les immigrés sont organisés, ainsi que des cours d’apprentissage supplémentaires pour les étudiants qui aspirent à avoir une meilleure réussite scolaire, comme l’aide aux devoirs, la préparation aux tests scolaires ou aux examens d’entrée du collège. Mme Alimi nous donne une astuce pour les parents : « Je conseille à tous les parents d’aider autant que possible leurs enfants à faire les bons choix d’orientation professionnelle, de les soutenir tant sur le plan pratique que sur le plan psychologique et émotionnel. Il faut qu’ils se renseignent et demandent de l’aide en dehors de leur maison, car cela leur permettra de mieux conseiller leurs enfants dans leur orientation professionnelle, et d’augmenter leurs chances d’accéder à un avenir meilleur et prospère ».

 

 

 

 

 

 

« Le djihad est une guerre menée par des terroristes »

Alimi s’exprime sur le danger que représente le djihad islamique pour les jeunes albanais de Suisse. Nombreux sont ceux qui se font piéger par des organisations religieuses et des réseaux secrets que les croyants qui fréquentent les mosquées suisses ne connaissent pas. Le cas le plus récent est celui du double champion de boxe thaï, Valdet Gashi, qui a quitté sa famille et a rejoint l’organisation terroriste ISIS qui mène la guerre en Syrie avec l’objectif d’instaurer un État Islamique selon la charia.

Albinfo.ch : Des rumeurs sur l’existence d’un réseau terroriste en Suisse qui organiserait le départ de jeunes vers la Syrie circulent. Le Digo a-t-il plus d’informations concernant ces rumeurs et est-il au courant du cas de Valdet Gashi ?

Bekim Alimi : Bien sûr que nous n’avons pas d’informations sérieuses sur ces organisations, car comme vous le savez ces activités se font de manière secrète et très confidentielle. Dans les situations où nous avons pu déceler un tel cas, il était trop tard car la personne se trouvait déjà à l’étranger.

Le cas dont vous avez parlé n’a aucun lien avec notre canton. Mais nous nous intéressons à tous les jeunes et nous sentons responsables s’ils s’égarent. Peu importe s’ils viennent de Genève ou de Saint-Gall, ce sont tous nos enfants. Les membres des réseaux de recrutement ne fréquentent pas les grandes mosquées en Suisse, car ils prendraient le risque d’être repérés.

Albinfo.ch : Traitez-vous, au sein de l’Union des imams et de Digo, de sujets tels que le terrorisme ; et si c’est le cas, quelles mesures de prévention avez-vous pris ?

Bekim Alimi : Entre imams, à l’intérieur de la mosquée, nous discutons souvent de ce sujet. Quand nous apprenons de nouveaux départs, nous sommes les premiers à ressentir la perte, tout autant que leur famille. Le sujet est très grave et nous préoccupe tous. Les parents viennent souvent nous exprimer leur peur. Mais personne n’est venu me parler ouvertement d’un éventuel départ.

Albinfo.ch : Qu’en est-il du travail de prévention ?

Je le répète, ce sont les imams et l’Union des Imams Albanais qui prennent des mesures afin d’empêcher la radicalisation des jeunes, car ils sont plus proches d’eux. Moi-même je collabore avec d’autres imams et nous avons organisé les vendredis des prédications sur le sujet. C’est une sorte de prévention, nous leur expliquons ce qu’est un Islam pur. Sur la page Web de l’Union des Imams Albanais, vous pouvez trouver un texte intitulé « Je suis un musulman albanais en Suisse » dans lequel nous condamnons la radicalisation.

Albinfo.ch : Étant imam de la région, quelle est votre opinion sur ces jeunes qui aimerait partir faire le djihad ?

Bekim Alimi : La guerre qu’ils veulent mener en Syrie n’a rien à avoir avec le mot djihad. Car ce mot est saint et on ne peut pas supprimer des vies humaines au nom du djihad. Il faut que les jeunes soient attentifs à la propagande négative. Car la Syrie est un grand pays et n’a pas besoin de nos jeunes pour se libérer. En ce moment ils sont des milliers à quitter leurs pays. Je prie Dieu en ce mois de ramadan pour que le peuple syrien retrouve la paix.

Albinfo.ch : Condamnez-vous les actes terroristes et les crimes qui ont lieu en Syrie ?

Les meurtres commis par ISIS, je les considère non-légitimes et contraires à l’Islam. Comment Isis pourrait-il représenter l’Islam alors que tous les jours des gens sont emmenés dans le désert pour y être massacrés. Évidemment que je suis contre ce qu’ils font.

Albinfo.ch : Pouvons-nous dire que les jeunes albanais qui inconsciemment partent pour faire le djihad font partie d’une organisation terroriste ?

Bekim Alimi : J’ignore ce qu’ils deviendront une fois arrivés là-bas. Mais nous regardons tous les jours ce qui se passe en Syrie. C’est contraire à l’Islam. Ce sont des actes d’un haut niveau terroriste. Nous devons être proches de ces jeunes et discuter avec eux avant que ce ne soit trop tard. Car l’islam ne veut pas dire tuer l’autre et surtout d’autres musulmans.