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Elez Han, municipalité kosovare où prévaut la transparence

“La fonction du maire doit être perçue comme un poste qui sert le peuple, et non pas comme un privilège. Il faut que être conscients du fait que nous l’avons obtenu par le peuple et c’est au peuple qu’il faut rendre des comptes”, explique Refki Suma. C’est son troisième mandat en tant qu’indépendant (affilié à aucun parti) à la tête de la municipalité d’Elez Han, au sud du Kosovo

Lundi, 9 heures du matin. Nous nous trouvons dans les bureaux de la municipalité d’Elez Han et attendons de rencontrer le maire. Alors que nous nous préparons à prendre notre premier café avec lui, on nous informe qu’il est au bout de son troisième entretien. En effet, lorsque nous entrons dans son bureau, nous comprenons vite qu’il a pris son premier café bien plus tôt dans la journée, autour de 06h00 du matin, heure à laquelle il débute habituellement son travail. Modeste, dévoué et extraordinairement accueillant, Monsieur Refki Suma prend son temps pour nous parler de son travail et de ses défis en tant que maire de la commune Elez Han.

Albinfo.ch: remporter largement trois mandats consécutifs de maire, sans aucune campagne, est sans soute un aaaaaaaindicateur de satisfaction des citoyens sur la façon dont est gérée leur municipalité. Quelle est la clé d’un tel succès ?

Refki Suma: Premièrement, le poste de maire doit être perçu comme un poste qui sert le peuple, et non pas comme un privilège. Il faut être conscient du fait que nous l’avons obtenu par le peuple et que c’est au peuple qu’il faut rendre des comptes. Toute ma vie, que ce soit avant ou après la guerre, j’ai travaillé dans l’intérêt des citoyens. Lorsque je me suis présenté comme candidat à la municipalité, je l’ai fait en tant que candidat indépendant. Je n’ai pas fait de promesses devant les citoyens mais j’ai toujours été d’avis qu’il fallait travailler avec les moyens que nous avons à disposition. Les demandes des citoyens sont parfois larges mais nous avons le droit de nous engager seulement selon ce que le budget nous permet.

Albinfo.ch: Dans quel état était la municipalité lorsque vous avez débuté ?

Refki Suma: Elez Han en 2008 devient une municipalité à pleines compétences, avant elle était sous administration de la municipalité de Kaçanik. En ce temps, nous n’avions même pas d’administration communale. Progressivement, le nombre de services publics a augmenté, tout comme le nombre d’employés municipaux. L’émission de cartes d’identité, de passeports, l’inscription des voitures, le cadastre etc… ont été assurés jusqu’en 2008 par la municipalité de Kaçanik avant d’être transférés chez nous. Durant le temps où Elez Han n’était pas une municipalité, je vous assure que le centre de la ville n’avait ni béton ni éclairage et quasiment 100% des routes des villages étaient parsemées de cube de béton. Or actuellement, l’éclairage pour tous les foyers et établissements, et ce même dans les villages, est achevé ou est en cours de réalisation. Un grand travail a également été mené au niveau des lits des ruisseaux et rivières. Nous avons aussi rénové le stade de football a été rénové, tout comme les écoles, qui sont toutes équipées de fournitures modernes. Les citoyens des catégories sociales défavorisées et celles sorties de la guerre bénéficient continuellement de notre aide, et ainsi de suite.

 

Albinfo.ch: De quelle façon un citoyen peut-il s’exprimer chez le maire de la municipalité ?

Refki Suma: Il existe plusieurs modèles. Il y a des maires qui ont des jours spécifiques où ils accueillent des citoyens, avec des rendez-vous. Chez moi, il n’y a pas d’heure ni de jour spécifique. Si les habitants de la commune ont besoin de me rencontrer, ils peuvent venir sans prévenir, à moins que je n’ai quelque chose de prévu auparavant. Par exemple, aujourd’hui, jusqu’à 7:30, j’ai rencontré 2 citoyens. D’habitude, lorsqu’ils veulent me voir et que je suis libre, je leur propose de venir entre 6 et 8 heures du matin. C’est la période durant laquelle j’ai le plus grand nombre de rencontres avec les habitants mais il arrive qu’ils surviennent également pendant ou après l’horaire du travail. Parfois, durant le weekend. Hier soir, par exemple, j’étais sur le terrain à superviser des travaux de route jusqu’à 22h00. Je peux vous assurer que je passe plus de temps à discuter des problèmes personnels des habitants que de problèmes institutionnels.

Albinfo.ch: Ce résultat est-il le fruit de votre travail seulement, où y’a-t-il un soutien extérieur?

Refki Suma: Tout ce travail ne se fait pas soutien. Souvent, les gens commentent en disant que je suis un maire spécial pour le travail que je fais. Ma réponse est que les habitants sont bons et les mérites leur reviennent. Lorsque j’ai leur soutien, je peux moi aussi faire mon devoir de maire.

Albinfo.ch: La corruption, en tant que phénomène, est très présente au sein de notre société. Comment la combattez-vous dans la municipalité que vous dirigez ?

Refki Suma: Je vais illustrer ceci avec un cas concret. Moi, par exemple, je vais sur le terrain pour superviser un projet. Je demande toujours aux responsables des travaux si, par hasard, quelqu’un de la municipalité a tenté un chantage. Les employés sous ma direction craignent même d’aller à un déjeuner si’ils sont invités par l’entreprise qui exécute les travaux par peur de créer un malentendu. Il faut tenir compte du fait que cela fait trois mandats que je suis maire. Plus de la moitié des employés municipaux étaient mes adversaires politiques, mais aucun d’entre eux n’a subi de licenciement, même si beaucoup d’entre eux l’ont mérité.

Albinfo.ch: La transparence est un élément important de votre travail. Que faites-vous exactement pour rendre transparent le travail de votre municipalité

Refki Suma: Vous pouvez librement consulter notre page Facebook où nous publions toutes nos activités. En outre, vous pouvez également jeter un œil sur l’édition du « Vjetari » (Rapport annuel) que l’on publie chaque année et dans lequel nous présentons les activités, le budget de la municipalité, les rapports des dépenses et ainsi de suite.Toutes les décisions sont scannées et publiées de cette façon. La publication des données de cette manière a été soutenue par DEMOS (Projet soutenu par la Suisse) et nous la mettons en place chaque année. En plus de cela, nous planifions le budget pour l’année suivante après avoir discuté avec les citoyens. Nous nous rendons dans chaque village et organisons des discussions où nous les questionnons sur leurs besoins. Cela peut paraître incroyable mais durant ces sessions avec les habitants, nous leurs proposons plus qu’ils en demandent.

Albinfo.ch: Quels sont les projets et défis suivants ?

Refki Suma: Ce dont a besoin Elez Han en ce moment est une salle de sport. Jusqu’à présent, nous avons eu des salles construites dans le cadre des différentes écoles de la municipalité alors que maintenant nous sommes en train de travailler sur un projet d’une salle qui servira également de centre sportif. Un autre projet important qui doit être traité et pour lequel nous sommes en pourparlers avec le ministère responsable et la Banque Mondiale, c’est la réparation du lit de la rivière Lepenc. Le projet prévoit également une promenade.

 

Albinfo.ch: Pour clôturer, avez-vous quelque chose à dire à ceux qui liront cet entretien ?

Refki Suma: Evidemment, pour arriver là où nous sommes aujourd’hui, il ne faut pas oublier l’aide internationale qui nous a été offerte. J’aimerais notamment mentionner le soutien de la Suisse à travers le projet DEMOS (autrefois nommé LOGOS), qui nous a aidés durant la période initiale, lorsque nous avons obtenu les pleines compétences en tant que municipalité.