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Carnet de route au Kosovo (4): dessiner des routes et tracer un chemin

  • Foto: Marie Deschenaux

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La pièce est petite, les enfants sont nombreux, l’excitation est vive. Nous sommes à Fushe Kosove, en pleine banlieue de Pristina, dans un centre de vie pour les enfants des communautés minoritaires. «Les enfants sont très fiers de vous montrer cette exposition de peintures qu’ils ont réalisées sur le thème de leurs droits et devoirs», nous explique leur jeune tutrice, employée de Terre des hommes. Je suis assis à côté des œuvres des enfants avec les étudiantes du gymnase de Burier qui nous accompagnent. Les artistes en herbe nous jettent des regards fiers et nous désignent du doigt le résultat de leur travail. Pour une fois, ce sont eux qui dirigent et ils ne sont pas là pour apprendre, mais pour nous transmettre leur vision du monde. Issus de familles défavorisées et souvent tentés par la mendicité, le lavage des pare-brises ou la récolte des cannettes plutôt que d’aller à l’école, il est crucial qu’ils prennent conscience de l’importance de s’instruire. La maîtresse et l’école sont donc naturellement des thèmes qui reviennent souvent dans leurs tableaux. Mais nous remarquons aussi que presque tous ces enfants roms ou Ashkali ont dessiné des routes.

Allers-retours

Je demande naïvement: «Elles mènent où toutes ces routes?» Les enfants s’agitent. Tous ont une réponse différente. Je ne comprends pas les phrases, mais je saisis presque tous les noms de pays avoisinants ou européens, y compris la Suisse bien sûr. La tutrice explique: «Au moment de l’année où nous avons commencé ces tableaux, nous étions dans une forte période de migration. » Nombreux sont ceux alors qui étaient obsédés par l’idée de fuir le Kosovo avec leur famille pour espérer trouver de meilleures conditions ailleurs. «Et il y en a qui sont vraiment partis depuis?», demande Yuna, l’une des étudiantes de Burier. Oui, certains sont partis, puis sont revenus pleins de désillusions. D’autres se sont effectivement éclipsés, mais personne ne sait vraiment où ils se trouvent et dans quelles conditions ils vivent.

Le chemin le plus épatant que ces enfants pourraient dessiner serait celui qui les mènerait jusqu’à la fin de leurs études. C’est alors au Kosovo qu’ils traceraient leur route afin d’ébaucher un pays plus proche de celui qu’ils imaginent trouver en migrant. Mais, pour le moment, il est l’heure de conclure le vernissage de cette exposition. Les enfants se lèvent et se lancent dans une démonstration bluffante de beat-box. Tout cela dans une insouciance qui devrait pouvoir aussi leur être offerte le reste du temps.